Téléphonie Mobile Et L'Orientation Client : Nouveau Paradigme Ou Mirage Publicitaire ?

Par Sabin BETEBE:
« Le marketing est le mécanisme économique et social par lequel individus et groupes satisfont leurs besoins et désirs au moyen de la création et de l’échange de produits et autres entités de valeur pour autrui » (P. KOTLER et B. DUBOIS).

Le 20e siècle aura vu la gestion de l’échange avec le marché évoluer sous diverses optiques. De l’optique production à l’optique vente, passant par l’optique produit, toutes ces formes aussi variées que limitées se focalisaient uniquement sur l’entreprise elle-même.

La nécessité de créer, de délivrer et de communiquer de la valeur n’étant pas alors mise en évidence. C’est donc cette dernière mission que viendra plus tard remplir l’optique marketing. Celle-ci exige une orientation centrée sur le client, ses besoins et ses désirs, et une adaptation cohérente, non pas erratique, des différentes variables Produit - Prix - Distribution - Communication.

En d’autres termes, c’est par une bonne analyse du marché qu’on concevra le produit qui a les valeurs ou attributs qu’il lui faut, au prix adéquat, distribué dans des canaux accessibles. La communication serait, en toute évidence, la variable qui viendra le faire connaître (registre cognitif), le faire aimer (registre affectif) et le faire acheter (registre conatif).

La critique doit être constructive, car elle nous pousse à nous surpasser. Cette inspiration de Dale CANNERGIE m’amène à porter un regard critique, mélioratif non pas péjoratif, vers un secteur qui présente des particularités indéniables au Cameroun : le secteur de la téléphonie mobile. S’il participe de très forte manière à l’économie nationale (PIB, emplois, investissements, etc.), il présente aussi un dynamisme commercial des plus remarquables traduit par la quête permanente des parts de marché, la fidélisation de la clientèle et une effervescence en actions communicationnelles qui « perturbe » le consommateur et pousse chacun des acteurs à innover au quotidien.

Cependant, peut-on encore croire en la franchise de leurs messages publicitaires vis-à-vis de leur marché de consommateurs ? Pourrait-on encore prétendre à un souci d’attribuer des valeurs intrinsèques et extrinsèques au produit , des valeurs qui sont recherchées par les abonnés ?

Si tous ces annonceurs optent pour une image de marque forte, il n’en est pas moins que la qualité perçue par les clients n’est pas irréprochable. La qualité (ndlr) englobe l’ensemble des caractéristiques d’un produit ou d’un service qui affectent sa capacité à satisfaire des besoins exprimés ou implicites.

Les abonnés ont des attentes. Et la prétention à l’existence de cette qualité n’est valable que lorsque les attentes de ces abonnés sont satisfaites. Et (ce n’est qu’un rappel) la diversité des attentes non satisfaites des abonnés n’est plus à démontrer.

Une étude qualitative menée en 2008 dans le cadre de nos recherches propres auprès d’un panel de 12 répondants, nous a permis de déceler de nombreuses incohérences. Et diverses sont les plaintes. Notamment celles afférentes à la saturation du réseau en périodes de forts flux ; « il devient aléatoire de communiquer sûrement avec un ami les jours de fêtes ». La non disponibilité du service client (numéros courts) ; « j’avais besoin de savoir comment sauvegarder mes numéros… j’ai à plusieurs reprises appelé le service client, mais tous les correspondants étaient occupés ». La limitation du réseau ; « quand je suis sur l’axe lourd Yaoundé - Douala en voyage d’affaires, mes communications sont en permanence interrompues ». L’indisponibilité des cartes de recharge ; « j’ai ‘pris les ailes’, mais il me faut traverser toute la ville pour espérer trouver une carte easy recharge ». La surcharge du réseau ; « parfois, il me faut lancer le même appel plusieurs fois pour espérer avoir la ligne… ». Entre autres, et l’on ne saurait être moins exhaustif.

Le recueil de ces informations porte à croire en un mirage publicitaire, tant les messages des annonceurs sont émoustillants. De l’omniprésence et la référence pour l’un, à l’assurance du lendemain pour l’autre passant par la mobilité pour un tiers, la cohérence de ces axes de communication avec l’opérationnel semble mitigée.

MTN s’est d’abord positionné sur la couverture du réseau, puis sur le meilleur réseau malgré tous les déboires qu’on lui a connus. Après avoir longtemps misé sur l’avenir en utilisant la jeunesse dans ses messages, Orange a préféré annoncer qu'elle gagne du terrain au quotidien par l’extension permanente de son réseau. Ce qui s’observe également chez CAMTEL qui communique sans cesse sur l’élargissement de son réseau.

La question essentielle porte alors sur l’essai de minimisation, voire de rupture, entre l’image voulue par les annonceurs et l’image perçue par les abonnés. Car, une marque, c’est un nom qui a du pouvoir (Françoise BONNAL). Et la marque n’est pas, et ne saurait être, sous le contrôle de l’entreprise. Elle est sous la souveraineté du client. Et l’orientation client en est le plus fervent moyen…

Sabin BETEBE,
Ingénieur Commercial
UCAC


2 commentaires:

Georges Mani said...

Merci Sabin pour cet article, qui à mon avis, consacre un retour à l'orthodoxie des notions essentielles de relations clients-entreprises.
Mais mon frère, réseau saturé, c'est comme embouteillage sur le pont du wouri. Indisponibilité de carte de recharge c'est comme coupure de courant de AES pendant la retransmission en direct du match cameroun-gabon, comptant pour les éliminatoires can-mondial! limitation du réseau c'est comme prendre axe lour pour arriver à "kongo" dans l'est profond du Cameroun (Merçi DAVY de me faire découvrir mon pays à travers tes posts). Tu dis qu'ils contribuent à l'économie? Orange emploit combien de cadres Camerounais sur le ratio des expats? Contribution mon oeil! (excusez moi de peu du terme) plus sérieusement, ne souhaitant pas éluder leur contribution dans l'économie camerounaise,je suis de ceux là qui pense que le secteur de la téléphonie mobile actuelle au cameroun est à l'image du Cameroun tout entier, c'est à dire des gouvernants et de son peuple! Les gars brassent des milliards /semaine, et la SABC demeurent l'entreprise privée 1er contributeur fiscal de l'état camerounais ( je ne boss pas la bas)! est ce normal? allons voir les chiffres, les vrais!!!!!
Sabin s'est efforcé sur une base scientifique à démontrer qu'une activité à vocation marketing développé par une entreprise doit essentiellement s'orienter vers la satisfaction de l'acteur qui contribue à son éssor, c'est à dire le consommateur,MAIS non seulement, le production s'en bat les couilles (2è excuse) mais aussi et surtout le CONSOMMATEUR CAMEROUNAIS (il fait pitié) n'en a strictement rien à cirer! il se pleint jamais, il ne se manifeste jamais et surtout, on le corompt facilement (MTN après l'inauguration du stade de Mbouda à l'ouest du Cameroun, dit qu'ils vont construire 1 stade dans chacune des 10 régions du cameroun. Je ris quand je lis de tels actes, une façon bien maquillée de voiler la vérité. Si nous savions les économies que ces opérateurs se tapent à travers saturation de réseau et perte de crédits, il y'a de quoi construire 10 tramways reliant Mora à Kie-ossi!).
Mon avis est simple! le combat de brillants intellectuels dont fait partie Sabin (sans fausse modestie, tu sais que je le pense) est à un autre niveau, là où les esprits détournés usurpent ce qui revient de droits aux plus faibles. Sachons juste analyser au mieux les signaux au profit de la masse.

Georges Mani

Sabin BETEBE said...

Georges, je suis sûr de t'avoir connu plus compatissant. J'imagine et comprends ton insatisfaction tant le secteur de la téléphonie au Cameroun est à plaindre. Ce qui est grâve, ce n'est pas le pouvoir socioéconomique de ces acteurs incontournables (le téléphonie mobile fait désormais partie de nos us et moeurs et Mtn et Orange figurent dans le top 10 des grandes entreprises au Cameroun), mais c'est le "bleuf", c'est-à-dire l'incohérence entre les messages et les actions sur le terrain. Restons pragmatiques? S'il est vrai que ces deux géants ont contribué à la révolution HR au CMR, toutefois, l'investissement doit suivre le pas pour satisfaire le consommateur. Celui-ci est-il vraiment au centre des préoccupations des opérateurs? Détient-il vraiment un pouvoir de négociation? Pas à ma connaissance. D'où la sollicitation de l'Etat qui lui aussi pêche dans la régulation du secteur. "Sachons analyser les signaux au profit de la masse" comme tu le dis si bien.Eh bien la masse a besoin d'en avoir pour son argent. MTN, ORANGE, CAMTEL, contruisez nous des pilones (fédérez si vous voulez), mettez à notre disposition des cartes, et arrêtez de nous pertuber avec vos spots pubs effervescents et utopistes. Vous faites partie des premiers de la classe (classement JA 2008: SNH-Sonara-Total-Sabc-Mtn-Aes-Orange-Cfao-Cimencam-Allucam), comportez-vous comme tel!

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